Taxation du kérosène sur les vols nationaux de l'aviation civile
Initiative citoyenne
Taxation du kérosène sur les vols nationaux de l'aviation civile
L’objet de cette pétition est de proposer la mise en place d’une taxe sur l’utilisation du carburant de l’aviation civile, le kérosène, pour les vols nationaux.
Le kérosène est l’un des responsables de l'émission de gaz à effet de serre. 2 à 3 % des émissions au niveau mondial proviennent du secteur aérien. En France, Les compagnies aériennes utilisant le kérosène sont intégralement exonérées de la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), sur tout le territoire français.
Or, l'empreinte carbone d'un avion est supérieure à celle d'une voiture, et 40 fois plus importante que celle d'un TGV. En effet, selon l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), sur un trajet national, l’avion consomme 1,7 fois plus que la voiture, et 2,5 fois plus que l’autocar. Pour le TGV, 45 fois plus d’émissions de CO2. Cette exonération date de la Convention internationale de Chicago adoptée en 1944, le secteur de l’aviation civile internationale bénéficie d’une exemption de taxe sur le carburant. L’objectif était de favoriser l’essor du trafic aérien et d’encourager les échanges au lendemain de la guerre. La convention est donc adoptée par les 191 Etats membres de l’Organisation de l’aviation civile internationale.
Aujourd’hui, 75 ans après l’adoption de cette convention, l’exemption fiscale du kérosène apparaît totalement inappropriée et contraire aux enjeux actuels face au changement climatique, comme en témoigne les statistiques de pollution sus-énoncées.
Si le transport aérien n’est responsable aujourd’hui que de 3% des émissions de gaz à effet de serre en Europe, les projections de l'Association du transport aérien international prévoient un doublement du trafic d’ici à 2036 et en 2050, les émissions du secteur pourraient atteindre 20% des émissions totales, si la situation reste inchangée.
Si les vols internationaux restent aujourd’hui protégés par la convention de Chicago, ce qui pourrait se justifier par le fait que l’avion est un des seuls moyens de transport permettant de connecter rapidement et facilement les pays et leurs populations entre eux, rien n’interdit de taxer les vols intérieurs, à l’instar des pays comme le Brésil, le Japon, la Norvège ou encore les Pays-Bas.
En effet, il n’existe pas de taxation du kérosène sur les vols internationaux non plus au niveau européen. Cependant, libre aux États membres d’instaurer une taxation pour les vols nationaux.
A titre d’exemple :
- Les Pays bas ont mis en place une taxation sur le kérosène avec l’introduction d’une taxe carbone de 7 euros par billet d’avion en 2021 pour les vols nationaux.
- La Suède taxe le kérosène utilisé lors des vols interterritoriaux avec l’instauration d’une taxe dite « taxe climat » de 6 à 39 euros sur les billets d’avion. La mesure s’avère payante, puisque le nombre de passagers a diminué de 5% sur les vols intérieurs suédois.
Malgré une série d’amendements à la loi Mobilités proposée afin d’y introduire une taxation du kérosène, le gouvernement reste insensible à cette question au motif que la question devait être traitée au niveau européen, si ce n’est mondial, pour ne pas pénaliser les entreprises françaises.
Au niveau communautaire, des discussions ont été entreprise mais aucune mesures concrètes n’as vu le jour. En novembre 2019 neuf pays ( la Belgique, la Bulgarie, le Danemark, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suède ) ont demandé à la Commission d’examiner la question de la tarification de l’aviation. Ensemble, ces pays sont responsables de plus de 50 % des émissions produites par le secteur aérien européen, ce qui correspond à plus de 3 % de la production totale de gaz à effet de serre de l’Union.
Une étude de la Commission européenne d’avril 2017, commandée par la direction générale des transports recommande d'introduire une taxation du kérosène afin d'éviter une explosion du trafic aérien dans les années à venir.
En attendant, un potentiel changement sur ce point au niveau communautaire, rien n’empêche les pouvoirs publics français de se pencher sur la taxation du kérosène utilisé par l’aviation civile.
D’autant qu’une telle taxation permettrait de réduire de 9% les émissions de gaz à effet de serre et l’argent dégagé pourrait permettre de financer d’autres modes de transports, comme le train, et permettre la réimplantation des petites lignes. (Axe sur le kérosène : la grande évasion de l'aviation, France culture)
Comme le rappelle Réseau Action Climat, si la France décidait de taxer le kérosène de ses vols intérieurs (20% du trafic aérien national), elle pourrait récupérer près de 310 millions d’euros par an, et jusqu’à 3 milliards si elle taxait également les vols à l’arrivée et au départ dans ses aéroports.
Cette exonération est une entorse au principe de pollueur-payeur puisqu’il s’agit d’une pollution démontrée scientifiquement. De plus, aucun texte n’empêche la mise en place d’une taxation au niveau national et donc d’appliquer ce principe et pourtant, rien n’est prévu. Il y a donc un dommage causé à l’environnement sans réparation.
Pourtant, le principe pollueur-payeur a été adopté par l’OCDE en 1972, comme un principe économique visant l’imputation des coûts associés à la lutte contre la pollution.
En droit français il est un des principes généraux du droit de l’environnement.
Il est prévu au niveau national par l’article L110-1 du Code de l’environnement : « Le principe pollueur-payeur, selon lequel les frais résultants des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ».
De plus, la Charte de l’environnement lui confère une valeur constitutionnelle puisqu’il figure à l’article 4 « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu'elle cause à l'environnement, dans les conditions définies par la loi. »
Selon ce principe, les frais engagés pour éviter, réduire ou compenser une pollution ou toute autre atteinte à l'environnement sont à la charge de celui qui en est reconnu responsable.
Or, contrairement à l’avion, des taxes existent sur l’énergie utilisée dans ces autres modes de transport. Le carburant de la voiture et de l’autocar supporte la TICPE mais également la TVA à taux plein (sur le produit hors taxes et sur la TICPE). Quant au train, c’est sur l’électricité qu’il y a des taxes : la TVA et la TICFE (Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité) à taux réduit.
Nous pouvons également citer par exemple la Taxe malus sur les véhicules les plus polluants : cette taxe pèse sur les citoyens lors de la première immatriculation en France de certains véhicules particulièrement polluants.
La « Taxe carbone » quant à elle est une composante de la TICPE. Elle a pour but de réduire les émissions de gaz à effet de serre en augmentant le prix d’un bien ou d’un service en fonction de la quantité de gaz à effet de serre émis lors de son utilisation. Cette taxe se retrouve donc dans le prix des carburants et pèse donc sur les utilisateurs de véhicules automobiles.
La seule taxe appliquant le principe pollueur-payeur en matière d’aviation est la taxe sur les nuisances sonores aériennes, perçue par les personnes publiques ou privées exploitant des aérodromes pour lesquels le nombre annuel de mouvements d'aéronefs d'une certaine masse au décollage atteint ou dépasse un seuil.
En raison de ces différents éléments, il semble donc important, pour le respect du principe constitutionnel de pollueur-payeur que l’aviation civile se voit débitrice de la réparation des dommages causées par les effets néfastes de sa consommation de carburant sur l’environnement.
Nous proposons dès lors au Parlement d’étudier la création d’une taxation du kérosène sur les vols nationaux de l’aviation civile.
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